Depuis près de six ans, l’éolien en mer est son horizon. Pour le compte de la Commission nationale du débat public (CNDP), Francis Beaucire a piloté le débat public du projet de Normandie, puis entre 2021 et 2022 celui d’Oléron.
Désormais, ce géographe de formation, ancien professeur à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, a intégré le noyau coordinateur de La Mer en débat, large concertation (1) dont l’objectif est de cartographier les grands enjeux économiques, énergétiques et environnementaux, à l’échelle des quatre façades maritimes de la France métropolitaine.
XAVIER LEOTY/ « Sud Ouest »
En quoi…
Depuis près de six ans, l’éolien en mer est son horizon. Pour le compte de la Commission nationale du débat public (CNDP), Francis Beaucire a piloté le débat public du projet de Normandie, puis entre 2021 et 2022 celui d’Oléron.
Désormais, ce géographe de formation, ancien professeur à l’Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, a intégré le noyau coordinateur de La Mer en débat, large concertation (1) dont l’objectif est de cartographier les grands enjeux économiques, énergétiques et environnementaux, à l’échelle des quatre façades maritimes de la France métropolitaine.
XAVIER LEOTY/ « Sud Ouest »
En quoi consiste la technologie de l’éolien en mer ?
Elle permet de produire beaucoup plus d’électricité que l’éolien terrestre. Les éoliennes en mer sont des équipements beaucoup plus volumineux, ils peuvent s’élever très haut en mer. En mer, c’est une caractéristique naturelle, il y a davantage de vent, un vent plus fréquent, plus soutenu, même s’il tombe par moments. Plus on s’éloigne des côtes, plus il est fort et donc meilleur est le rendement d’une éolienne.
Même s’il y a là des zones de pêche, des sujets comme l’environnement ou la circulation maritime, un autre avantage à produire là est qu’il n’y a pas de riverains au pied des éoliennes.
Pour autant, comme l’a pointé le débat sur le projet d’Oléron, les éoliennes ne sont pas mieux acceptées par les populations qu’à terre ?
Absolument. Mais, deux faits importants se sont produits. D’abord, la promulgation de la loi pour un État au service d’une société de confiance dite loi Essoc d’août 2018, suivie en décembre 2020 de la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, la loi Asap. La loi Essoc a marqué un grand changement pour les quatre projets (Normandie, Bretagne, Méditerranée et Oléron) qui ont donné lieu à débats publics depuis 2018 : ils pouvaient désormais être modifiés en cours de débat.
Ça a d’ailleurs été le cas pour Oléron où, d’un projet de parc implanté à une quinzaine de kilomètres de l’Île, nous sommes arrivés au terme du débat à un projet éloigné à 40 kilomètres et situé en dehors des limites du Parc naturel marin de l’estuaire de la Gironde et de la mer des Pertuis, ce qui était le principal point d’achoppement lors du débat.
Quant à la loi Asap, elle dit en substance : ne lançons plus de débat public pour chaque projet de parc éolien en mer, mais organisons un débat d’ensemble, pour toutes les façades simultanément, afin de contribuer à définir de vastes zones au sein desquelles pourraient être positionnés dans l’avenir un ou plusieurs parcs. C’est tout le cadre de La Mer en débat sur la planification maritime.
En résumé, la loi Essoc a ouvert le débat public, lui donnant plus de pouvoir qu’il n’en avait avant. Et la loi Asap l’a refermé, disant qu’il n’y aura plus de débat après celui qui est en cours pour les zones pressenties pour les implantations de parcs éoliens en mer et pour les zones de protection de l’environnement.
À une échelle si globale de concertation, le débat n’est-il pas justement vidé de toute sa substance ?
La CNDP a dit que supprimer toute perspective de nouveau débat public est contraire au processus démocratique. Si l’État décide aujourd’hui d’un parc éolien dans huit ou douze ans et n’y revient plus, cela pose problème, d’abord parce que les gens qui seront alors concernés ne seront plus les mêmes que ceux qui ont débattu en amont.
Certes, la loi Asap vise à accélérer le processus de prise de décision pour créer ces parcs en mer, mais cela éloigne les citoyens de la dimension concrète des projets au moment où ceux-ci seront mis en œuvre.
C’est clairement un débat de politique publique par nature, plus abstrait pour les citoyens que le fait de leur parler du projet qui se fera à 30 kilomètres de chez eux.
Aussi, dans La Mer en débat, l’enjeu pour la CNDP est de faire comprendre à tous les publics qu’ils doivent s’en mêler, sachant que les parties prenantes (pêcheurs, ONG de protection de l’environnement, etc.) ont en revanche déjà parfaitement suivi les enjeux de cette planification dans l’espace et dans le temps.
Neuf candidats à la réalisation et à l’exploitation du projet éolien d’Oléron sont entrés en dialogue concurrentiel avec l’État, qu’est-ce que cela signifie ?
Le dialogue concurrentiel est une procédure non publique au cours de laquelle l’État, qui a défini le cahier des charges du parc, sollicite les parties prenantes des groupes pêche, environnement et autres usagers. Il attend d’elles des propositions à intégrer à ce cahier des charges. De leur côté, les neuf industriels dialoguent avec la puissance publique. Ils attendent de l’État une réponse convenable et crédible au plan économique. La sortie du dialogue doit être aussi crédible pour l’État eu égard aux demandes que formulent les parties prenantes, mais aussi sur la question du prix – une clé du dialogue – auquel il va acheter l’électricité à l’industriel.
Le lauréat du projet doit être désigné en 2024. Pour mémoire, le projet prévoit un premier parc d’une puissance de 1 GW avec extension possible à un second parc également de 1 GW. En clair, le projet se poursuit.
À examiner la cartographie proposée pour La Mer en débat, Oléron n’est qu’une première pierre, d’autres projets verront le jour en Sud-Atlantique ?
Exactement. Les directions interrégionales de la mer et de l’environnement ont fourni des cartes précisant les zones proposées pour l’installation de l’éolien en mer et pour des protections environnementales fortes. S’agissant de l’éolien, une zone est tracée plus au large d’Oléron, à des profondeurs supérieures.
Compte tenu de l’état actuel de la technologie, une partie peut-être dédiée à des éoliennes posées sur le fond, une autre à des éoliennes flottantes. Mais évidemment, les publics sont en mesure de critiquer cette zone et de dessiner la leur, c’est un enjeu du débat actuel. La CNDP proposera d’ailleurs un atelier cartographique à La Rochelle pour le nourrir.
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(1) La Mer en débat, du 20 novembre 2023 au 26 avril 2024.
« Sud Ouest » et TV7 au cœur du débat
La Commission nationale du débat public (CNDP) s’associe à « Sud Ouest » et TV7 pour deux débats consacrés à l’avenir de la mer, du littoral, de la biodiversité marine et de l’éolien en mer. Deux rencontres animées par Laetitia Langella (TV7) et Stéphane Vacchiani (« Sud Ouest »), journalistes, à retrouver sur sudouest.fr, sur notre espace événements, www.sudouest.fr/evenements. Diffusions le mercredi 7 février à 10 heures : « Tourisme et littoral dans le Sud-Ouest » et le jeudi 8 février, à 10 heures : ‘ » Quel éolien marin sur notre littoral ?’» avec l’exemple d’Oléron notamment.
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