Jeux olympiques, accusations de misogynie… Diane de Navacelle de Coubertin s’exprime sur l’héritage de son aïeul

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Il est l’homme qui a fait renaître les Jeux olympiques. Mais le comité d’organisation de Paris 2024 évite de le mettre en avant. Car des accusations de misogynie et de racisme ont refait surface. Pourtant, il y a deux ans, l’ancien champion Guy Drut et l’académicien Erik Orsenna avaient, en vain, demandé sa panthéonisation. Et la semaine prochaine lui sera dédiée. Mardi, le baron entrera en effet au musée Grévin.

Dimanche, une cérémonie se déroulera à l’université de la Sorbonne, là même où il y a cent-trente ans, le 23 juin 1894, fut créé, sous son impulsion, le Comité international olympique (CIO). Sa descendante, Diane de Navacelle de Coubertin, sans vouloir le « glorifier » ni le « réhabiliter », prend la défense de celui qu’elle appelle tout simplement « Pierre ».

Le JDD. À défaut d’entrer au Panthéon comme vous l’auriez souhaité, votre aïeul aura sa statue de cire au musée Grévin…

Diane de Navacelle de Coubertin. Le parallèle est très intéressant ! Je pense qu’il y a beaucoup plus de gens qui vont au musée Grévin qu’au Panthéon.

C’est génial de voir un personnage historique qui entre dans un tel musée. J’espère que ça permettra aussi à beaucoup de jeunes et de moins jeunes de le découvrir et de se dire : « C’est qui ce bonhomme, au fait ? Ah, c’est lui qui a créé les Jeux olympiques, il est français, c’est cool. » Peut-être que cela générera la curiosité d’aller au-delà de ce qu’on dit de lui aujourd’hui.

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Dans le JDD du 26 mai, Guy Drut regrettait que le baron de Coubertin soit « mieux considéré à l’étranger » qu’en France. Que vous évoque cette prise de position ?

Il n’y a pas que Guy Drut qui fait ce constat. C’est un choix politique, on est dans une période de wokisme et de MeToo. Ces périodes ont leurs avantages parce qu’elles permettent de mettre en lumière des choses, mais parfois elles jettent tout sans faire le tri.

Vous publiez un ouvrage reprenant les textes de Pierre de Coubertin et, dès l’introduction, vous citez les accusations à son encontre : « Misogyne, raciste et nazi »

Il a droit au super cocktail. C’est vrai, il a eu par exemple des phrases sur les femmes qu’aujourd’hui moi-même je trouve choquantes. Maintenant, la position de la femme dans la société il y a cent trente ans n’était pas la même…

« Dans cent ans, que dira t-on de notre époque ? »

Pierre de Coubertin a tout de même employé le mot « femelle » pour parler de la femme…

En même temps, il emploie aussi le terme « mâle ». Pourquoi le mot femelle est-il dérangeant et pourquoi le mot mâle ne l’est-il pas, finalement ? Il y a des mots qui ont évolué. La langue évolue en permanence, d’ailleurs.

Je vais vous donner un exemple très bête. Quand j’étais petite fille, j’allais à la boulangerie et je demandais une tête de nègre. Et il n’y avait rien de mal à ça. Pour moi, c’était un super bon gâteau qui n’avait aucune connotation négative. Aujourd’hui, ce gâteau a été renommé [meringue au chocolat, NDLR]. Ce sont des termes qu’il ne faut pas renier. Il faut les expliquer pour comprendre notre histoire.

Dans cent ans, que dira-t-on de notre époque ? Qu’elle était celle du wokisme ? De l’ultra-parité ? Du féminisme ? Évidemment, je veux que les choses bougent, mais je ne veux pas qu’on passe d’un extrême à l’autre. Quand on est dans les extrêmes, on oublie les nuances.

Le 23 juin, les 130 ans de la naissance du CIO et des Jeux modernes seront célébrés à la Sorbonne. La ministre des Sports ne devrait pas être présente. Tony Estanguet, le patron de Paris 2024, se déplacera-t-il ?

La dernière fois que je l’ai vu, c’était lors de la passation de la flamme à Athènes, fin avril. Sa décision n’était pas encore prise. Ce qui est essentiel pour nous, c’est que le président du CIO, Thomas Bach, sera là. Dès que nous lui avons envoyé l’invitation, il n’a pas hésité une demi-seconde. C’était un oui d’office.

Dans votre ouvrage, vous rappelez aussi que la devise « L’important, c’est de participer » n’est pas du baron de Coubertin…

Cette phrase a été dite par l’archevêque de Pennsylvanie en 1908 pour les Jeux de Londres, alors qu’il venait encourager les participants américains. Pierre a trouvé que c’était dans l’esprit des Jeux.

Mais un athlète ne s’entraîne pas comme un taré juste pour participer. La version courte de ce qu’a reformulé Pierre, c’est : « L’important est de s’être bien battu. » C’est-à-dire que si on va aux Jeux, qu’on ne gagne pas mais qu’on a vraiment donné tout ce qu’on pouvait, on repart la tête haute.

Une dernière remarque concernant le baron Pierre de Coubertin. Il avait une particularité, il n’était pas très grand, non ?

En effet, 1,62 mètre, vous vous rendez compte ! Je suis plus grande que lui. Il était petit par la taille, mais peut-être qu’il était grand par ailleurs.


Éduquer par le sport et pour la paix, Textes de Pierre de Coubertin, Éditions Débats publics, 248 pages, 18 euros.

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