A qui sert le discours sur la fracture territoriale

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Le temps des villes et des territoires : tribune

Le temps des villes et des territoiresdossier

Par Xavier Desjardins, professeur à la Sorbonne Université, directeur d’études à la coopérative Acadie.

Comment réconcilier métropoles et campagnes, périphéries et centres-villes, écologie et habitat ? A l’heure de la transition écologique, en partenariat avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (Popsu), plongée dans les projets et initiatives qui améliorent les politiques urbaines.

Les discours sur la fracture territoriale sont légion. Géographes, sociologues et autres savants mettent en garde contre leur caractère réducteur ou trompeur. En effet, l’opposition entre «les métropoles et les autres», succédané contemporain du «Paris et le désert français», est affreusement caricaturale. Les campagnes sont d’une diversité stupéfiante en matière d’attractivité ou de qualité de vie. Les métropoles françaises (qui, hors Paris, sont d’aimables villes moyennes à l’échelle mondiale) ne sont que de faibles – voire très faible – aspirateurs de la croissance démographique ou économique. Alors, pourquoi parler de fracture ? Toute la difficulté est que trois types de discours sur la fracture coexistent et sont parfois difficiles à démêler.

Le premier type de discours est le plus évident : c’est le discours réactionnaire qui stigmatise la ville comme le lieu d’amollissement des vertus et d’un cosmopolitisme dangereux. L’écologie lui redonne aujourd’hui des atours qui séduisent. Les infrastructures techniques qui permettent à ces concentrations humaines de fonctionner construiraient un monde «barbare» qui éloigne les humains d’une nature mythifiée. A défaut de pouvoir détruire la ville, certains rêvent d’une «ville de villages», où tout se trouve à un quart d’heure…

Le second type de discours est moins net, car usant souvent de détours : c’est le discours des groupes de pression. En raison de l’importance des transferts monétaires publics, beaucoup d’acteurs locaux militent pour que leur situation particulière justifie un surcroît de dépenses publiques au nom de l’éloignement, de la topographie, des dynamiques démographiques, de la taille de la ville, etc. Associations d’élus locaux et autres acteurs territoriaux participent à un véritable concours de plaintes. Celui-ci n’est pas sans résultats : en France, les territoires qui font l’objet d’un zonage spécifique au nom de la ruralité, de la montagne, des quartiers populaires, du littoral, etc. sont tels que presque seuls les arrondissements qui bordent les ministères en sont dépourvus ! En Espagne, des partis politiques (comme Teruel Existe) n’ont d’autres programmes que de réclamer un meilleur traitement dans le partage de la dépense publique !

Le troisième type de discours est d’une autre nature. Il vise à exiger une plus grande capacité d’agir dans le tissu de relations qui lient les territoires entre eux. Si la transition écologique invite à protéger davantage de lieux, voire à créer des «lieux de nature» comme une forêt primaire, comment repenser les solidarités entre les territoires pour que certains ne soient pas seulement des lieux de compensation ? Comment faire en sorte que les espaces de production d’énergie renouvelable ou d’une agriculture respectueuse des limites planétaires en tirent non seulement des revenus directs, mais aussi de nouvelles capacités d’agir par des compétences professionnelles et une maîtrise sur le devenir des filières ? Comme les grandes villes sont les principaux lieux d’accumulation du capital, de nombreux discours dénoncent la place de la métropole, non par peur d’une grande ville vampirisante, mais pour exiger, de manière métaphorique, d’autres types de relations économiques et politiques entre les territoires.

Toute la difficulté est qu’une même figure rhétorique – l’opposition entre les métropoles et les autres – rassemble des options diverses et contradictoires. La géographie ne doit pas masquer la politique !

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