Le bilan du président Macron sur l’Europe n’est certes pas négligeable, comme il n’a pas manqué de le rappeler dans son discours de la Sorbonne du 25 avril 2024.
Sur un sujet, cependant, les progrès ont été minimes depuis son premier « discours de la Sorbonne » en 2017, surtout à l’aune du risque de déstabilisation que fait peser sur le Vieux Continent la guerre d’agression russe en Ukraine. Ce sujet, c’est la défense de l’Europe. Pourquoi cette difficulté des Européens à faire plus en ce domaine ? Nous serions tentés de résumer en une formule simple ce sujet compliqué : sous-estimation pendant longtemps de la menace russe, surestimation de la garantie de sécurité américaine (du moins, de sa pérennité).
Les Français faisaient certes profession de ne pas verser dans le second de ces deux travers, mais ils sont allés très loin dans le premier. Et, de ce point de vue, M. Macron s’est montré un continuateur particulièrement zélé. C’est la part d’ombre de sa politique européenne. La rencontre de Brégançon en août 2019 avait illustré une étonnante confiance dans le dialogue avec le Kremlin, prolongée même après l’invasion de l’Ukraine, sans compter une série de déclarations malheureuses (« ne pas humilier la Russie », par exemple). Difficile, dans ces conditions, de jouer un rôle de leader en Europe, de convaincre en particulier nos partenaires de la nécessité d’aller vers une plus grande autonomie stratégique.
Certains font valoir que l’illusion des autorités françaises sur la Russie était partagée par l’Allemagne et par beaucoup d’autres, dont les gourous américains de la politique étrangère tels que Henry Kissinger ou Zbigniew Brzezinski. Soit, mais la France n’avait pas dans l’affaire des intérêts aussi pressants que l’Allemagne, tout en étant moins éloignée de la réalité russe que l’Amérique post-guerre froide. Le Royaume-Uni n’est pas tombé dans le piège. A partir de 2011-2012, et plus encore de l’annexion de la Crimée en 2014, il aurait dû paraître évident que Vladimir Poutine avait fait le choix de l’affrontement sans merci avec l’Occident.
Cécité collective
Or, en fait, ce n’est pas seulement M. Macron qui s’est fourvoyé, c’est une bonne partie de la classe politique française, comme on pouvait le voir en 2017, quand il était le moins « prorusse » des candidats à l’élection présidentielle. Son prédécesseur, M. Hollande, a été plus clairvoyant que beaucoup d’autres, mais lui-même a voulu croire au « dialogue » avec la Russie en inventant avec Mme Merkel les négociations dites « de Normandie » (Allemagne, France, Ukraine, Russie) pour résoudre la crise ukrainienne.
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