D’abord prévue le 12 mai, la conférence de l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler à la Sorbonne sur les Frères musulmans a été reportée à ce vendredi soir. Un dispositif de sécurité est mis en place.
Une conférence sous haute protection, à la Sorbonne ce vendredi (18h). Depuis la parution de son livre « Le Frérisme et ses réseaux, l’enquête » (Ed. Odile Jacob), en janvier 2023, l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler est la cible d’une cabale sur les réseaux sociaux. Dans son ouvrage, elle dénonce l’influence des Frères musulmans dans notre société. Elle devait donner une conférence le 12 mai dernier à la Sorbonne, dans le cadre du diplôme d’université « référent laïcité » qui forme chaque année plusieurs dizaines de personnes aux enjeux contemporains de laïcité dans les secteurs de l’éducation et des entreprises, mais la doyenne avait demandé le report pour des raisons de « sécurité ».
Pour s’asseoir dans la salle de conférence, il faudra passer deux contrôles de sécurité. D’abord un contrôle d’identité avec fouille de sac sur le perron de l’université, puis la présentation obligatoire du carton d’invitation avant de passer la porte de l’amphithéâtre. Un amphithéâtre de 200 places qui n’a pas été choisi au hasard. Il n’a qu’une seule entrée et permet donc un meilleur filtrage. A l’intérieur, Florence Bergeaud-Blackler sera accompagnée de son escorte policière. Elle fera face à 100 personnes, pas plus, « question de commodité » fait savoir l’université. Les autres participants pourront suivre la conférence en ligne.
« Que cette conférence puisse avoir lieu, c’est plus qu’un soulagement, c’est essentiel pour la vie de l’esprit en France, pour faire en sorte que le débat ait lieu et ne soit pas interdit a priori par des pressions de toutes sortes », se félicite Pierre-Henri Tavoillot, président du Collège de philosophie et organisateur de cette conférence. Pointés du doigt pour leur frilosité en mai dernier, les autorités de l’université seront bien là pour accueillir la chercheuse.
« Le principal frein aux études sur l’islamisme, c’est le tabou »
« La conférence a été suspendue et donc reportée à ce soir, explique Florence Bergeaud-Blackler dans ‘Apolline Matin’ ce vendredi sur RMC et RMC Story. Elle aura lieu dans des conditions identiques. Je n’ai toujours pas d’éclairage sur les raisons (du report), puisque ce n’étaient pas des raisons de sécurité. La sécurité était assurée. Il s’agissait simplement d’éviter les troubles. Cela veut dire que certains sujets seraient plus problématiques que d’autres aux oreilles chastes des étudiants. Ça doit changer. Malheureusement, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ne m’a pas rassurée sur ce point-là, puisqu’elle a plutôt appuyé la décision de suspension. Il faut que ça change, qu’on soit en capacité de travailler là où on doit travailler. »
« Moi, finalement, je fais mon travail, je suis universitaire, ajoute la chercheuse du CNRS, qui a remporté le prix de la Revue des Deux Mondes. La première fois que j’ai rencontré les Frères musulmans, c’était il y a 30 ans, dans une mosquée bordelaise. J’ai pris parfois un peu de distance sur le sujet, avec des conditions de travail très difficiles auprès des Frères. J’ai travaillé sur le marché halal, sur l’économie islamique mondiale, mais je suis toujours restée attentive, observatrice, sur l’évolution de ce mouvement qui s’est installé en Europe dans les années 1960. Je l’appelle frérisme pour le distinguer de l’islamisme. Le frérisme, c’est la version adaptée à nos démocraties libérales et séculières de l’islamisme qui existe dans les pays musulmans. L’idée, c’est de contourner le politique pour passer par la diffusion de la norme à travers la culture et l’économie. Ils ont élaboré au fil du temps une technique d’infiltration, d’entrisme, pacifique. »
Et selon Florence Bergeaud-Blackler, le sujet des Frères musulmans est tabou en France. « Le principal frein aux études sur l’islamisme, c’est le tabou, le fait de ne pas vouloir voir cette dimension religieuse, souligne-t-elle. Nous avons perdu, depuis des siècles, l’idée de ce qu’est une théocratie. L’idée d’une gouvernance de dieu nous échappe complètement. Nous devons comprendre qu’il peut y avoir des théocrates qui utilisent la technologie et la modernité pour avancer. »
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