Florence Bergeaud-Backler, anthropologue et chercheuse au CNRS, a vu l’université de la Sorbonne reporter sa conférence sur son enquête consacrée aux Frères musulmans, sans plus d’explications. Elle dénonce ce mercredi sur RMC la passivité de l’université.
Un livre sur les Frères musulmans est-il à l’origine de l’annulation d’une conférence à la Sorbonne? Attendue ce vendredi 12 mai pour une conférence sur les Frères musulmans à la Fac de lettres de l’université, l’anthropologue et chargée de recherche au CNRS Florence Bergeaud-Blackler a vu sa venue reportée par la doyenne de la faculté. « L’université m’a informée que la conférence serait suspendue sans me donner de nouvelle date. Je ne connais pas les motivations. Il semblerait que cela concerne la sécurité », assure la chercheuse dans « Apolline Matin » ce mercredi sur RMC et RMC Story. « Peut-être que l’université a eu des pressions, mais moi je n’ai rien lu ou entendu, d’où ma surprise. C’est un peu la grande muette, l’université », ajoute-t-elle.
Car des menaces, Florence Bergeaud-Blackler en a déjà reçu par le passé après la parution de son livre « Le frérisme et ses réseaux, l’enquête« , consacré à l’influence du mouvement des Frères musulmans en Europe et particulièrement en France. Des menaces qui lui ont valu d’être placée sous protection policière un temps et qui seraient donc à l’origine de cette annulation, estime l’anthropologue.
« J’ai été plusieurs fois calomniée, menacée, insultée, diffamée », dit-elle. « Mon livre dérange car il parle de choses dont on n’aime pas parler en raison des dangers que cela peut entraîner. Je montre comment le « frérisme » a influencé deux voire trois générations réislamisées en Europe pour les soustraire à l’assimilation avec des stratégies d’entrisme sectorielles qui s’expriment notamment à l’université », poursuit Florence Bergeaud-Blackler.
« Les étudiants insupportables de la ‘cancel culture' » pointés du doigt
« Ce sont des questions sensibles mais il faut pouvoir en débattre », explique l’anthropologue, qui déplore l’inaction de l’université dans la protection des chercheurs qui travaillent sur des sujets sensibles. « On nous demande de payer des entreprises privées sur nos propres budgets de recherche, de passer par la petite porte, de ne pas afficher le programme de nos conférences. Ce sont des pratiques qui existent depuis longtemps mais ça suffit, il faut qu’on puisse ouvrir les débats », ajoute Florence Bergeaud-Blackler, qui en appelle aux autorités.
« L’université essaie de se couvrir, de protéger les étudiants et pas les chercheurs », déplore-t-elle, taclant aux passages « les étudiants insupportables de la ‘cancel culture’, qui viennent menacer tous ceux qui ne sont pas d’accord avec eux ».
Elle réclame la mise en place d’outils à l’université, en lien avec le ministère de l’Intérieur, pour protéger la liberté d’expression et les chercheurs.
De son côté, la Sorbonne se défend de toute censure. « La conférence n’a été ni censurée ni annulée mais reportée à une date ultérieure. Les conditions d’organisation n’étaient pas réunies », a assuré l’université mardi à BFMTV. La Sorbonne indique ce mercredi midi à RMC que la conférence aura lieu le 2 juin.
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