(3/6) Protestation de Pierre-Yves Hénin : Sur le fond.

 

L’ancien Président de Paris 1 Panthéon-Sorbonne dénonce l’interprétation du Quai d’Orsay au sujet de l’accord signé entre Paris 4 Paris-Sorbonne et Abu Dhabi. Selon le Ministère des Affaires Etrangères, aucune autre université comportant l’appellation « Sorbonne » ne peut s’implanter désormais dans les régions du Proche et Moyen-Orient. Pour Pierre-Yves Hénin, cette affirmation n’est aucunement justifiée juridiquement.

 

Selon Rue 89 : « En avril 2007, le procureur général du Qatar, l’équivalent du ministre de la Justice, Ali Bin Fetais Ali Marri, propose à Pierre-Yves Hénin de créer un institut affilié à l’université Paris I-Panthéon Sorbonne au Qatar. Les deux hommes montent le dossier et le communiquent à la garde des Sceaux Rachida Dati. Pierre-Yves Hénin raconte :

« Fin avril 2008 s’est tenue au Qatar la conférence de Doha sur la justice, en présence de Rachida Dati. Elle nous a dit : “Je prends sur moi pour signer l’accord de coopération.” Avant la conférence, elle a reçu un coup de fil de l’Elysée qui lui interdisait de signer quoi que ce soit. » »

 

Les mêmes objections officielles resurgissent en 2009, lorsque Paris 1 a été contacté pour créer une antenne au Bahreïn.

 

L’ambassadeur de France à Bahreïn, Yves Oudin, a adressé un courrier à Pierre-Yves Hénin : après consultation du ministère des Affaires Etrangères, « il m’est revenu que votre visite à Bahreïn soulevait des objections d’opportunité, je l’ai donc dit aux autorités bahreiniennes ».

 

Selon un courrier de Bernard Kouchner qui date du 18 février 2009: les autorités françaises sont liées par l’accord Franco-émirien qui « comprend une clause précisant que l’université sera l’unique implantation de l’Université Paris-Sorbonne au Proche et Moyen-Orient. Dans ce contexte et compte tenus des enjeux actuels de notre coopération avec les Emirats Arabes Unis, il n’apparaît pas possible de reprendre une deuxième fois l’appellation « Sorbonne » dans cette région du monde. »

 

Dans son courrier du 18 février 2009 à Nicolas Sarkozy, Pierre-Yves Hénin écrit :

 

« Par courrier du 6 février, je vous faisais part de mon invitation par Sa Majesté le roi du Bahreïn à me rendre à Manama à l’occasion de votre visite officielle. Je vous exprimais mon souhait de pouvoir préparer, avec l’interlocuteur que vous voudriez bien m’indiquer, les entretiens que je devais avoir avec les autorités du Royaume en vue d’approfondir le projet de coopération souhaité par Sa Majesté avec l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne.

 

Cette démarche de ma part faisait suite à des courriers à Monsieur Kouchner et à Madame Pécresse le 8 janvier les informant officiellement de nos projets, puisque ceux-ci répondaient à une sollicitation formulée par un Etat étranger au plus haut niveau.

 

Alors que j’étais sans réponse à ces courriers, j’ai été informé d’une démarche de l’ambassade de France auprès des autorités du Bahrein signifiant que ma présence sur place en ce jour était considérée comme inopportune. Cette démarche, confirmée par notre ambassadeur m’a conduit à décliner l’invitation du souverain, me plaçant ainsi en situation de grave indélicatesse à son égard.

 

Cet incident, survenant après l’annulation tardive de la signature d’une convention de coopération universitaire avec le Qatar, me conduit à m’interroger sur l’existence d’une politique visant à évincer mon université de toute présence dans la région du Golfe. Paris 1 Panthéon-Sorbonne personne morale autonome, ne saurait être engagée par la convention portant création de l’Université Sorbonne Abou Dhabi, dont la seule partie contractante française est l’université Paris4 Paris Sorbonne.

 

S’il existe un accord intergouvernemental dont résulterait l’éviction de mon université, nous devons être informés de son contenu et de sa raison d’être. La situation actuelle, qui semble procéder d’une telle logique, handicape gravement les possibilités d’action de Paris 1 dans la région, ce qui est source d’un préjudice important en termes de visibilité internationale et constitue un précédent aussi grave qu’injustifié dans l’appropriation de l’identité d’université de la Sorbonne. S’il est légitime que la coopération universitaire n’ignore pas les objectifs généraux de la politique extérieure de l’Etat, vous comprendrez bien que nos communautés universitaires soient attentives à une nécessaire transparence sur la nature des intérêts en jeu. »

Guillaume Mariani

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